29 novembre 1981

J050 - Retour à Delhi

Nuit assez perturbée dans ma casemate en contreplaqué léger, aménagée comme une niche afin d'agrandir la capacité du Guest House. Les parois sont si fines qu'un seul faible coup de pied suffirait à faire descendre une cloison entière.

Dans la nuit des indiens sont arrivés, bruyants, mettant à quelques uns, dans la pièce contiguë, la même animation et le même vacarme que dans leurs bazars.
Tôt dans la matinée, ils se sont retirés progressivement, la dernière nuisance étant le bruit d'une voix de femme s'éloignant, accompagné par les pleurs d'un gamin. Dehors, le garçon de l'hôtel a allumé son beedie et peu après, dans ma chambre toujours close, je profitais de l'odeur de cette reconnaissable fumée.


Faits divers

Ce matin, omelette qu'arrose le tea-pot accompagné du journal : une rue Beatles inaugurée à Liverpool, de nombreux faits divers indiens.
5000 roupies pour la famille du mort, 1000 roupies au blessé dans cet attentat à la bombe à Karnal, mesure d'exception pour montrer la largesse du gouvernement.
Un peu de business afin d'alléger mon volumineux paquetage. Pour 20 roupies, me voilà débarrassé de mon tapis de sol bleu qui m'avait coûté si cher dans ce magasin parisien.


Rickshaw

C'est toujours gênant de payer la sueur d'un homme, surtout quand on a sous les yeux ces mollets qui s'efforcent de transporter notre graisse. On a envie d'aider, pas de sourire au peuple comme Versailles défila en carrosse.
Devant la gare, déjeuner d'un massala dossa avant d'embarquer dans un bus basse catégorie, fort convenable.


Trajet sans histoire

On croise dans la campagne un cercueil coloré, porté et suivi par une trentaine de personnes. Beaucoup de chiens écrasés aussi, dont un qui avait étalé son cerveau sur plusieurs mètres, teintant de rouge le buvard de la terre.
Placé derrière le conducteur, j'apprécie à sa juste valeur les menaces d'accidents qu'il provoque puis esquive au dernier moment. Sur les bas-côtés, plusieurs camions renversés.
Sur la route, un joli crash camion contre autobus : les centimètres avaient été calculés trop chichement. Du coup, on voit le fauteuil du conducteur sans avoir à ouvrir la porte et sur la chaussée, l'infrastructure en bois des véhicules TATA fait une exhibition de pièces détachées.
Nous sommes doublés par un mini-bus conduit par une blonde. 7 noms germaniques inscrits à l'arrière. Le rêve de partir ainsi avec des copains pour un grand voyage.


Delhi

Après marchandage, le pousse-pousse passe de 15 roupies à 5 roupies.
Installation au Three Stars Guest House, avec ses petites chambres équipées de toilettes-douches. Il faudra trouver mieux quand même, surtout que le prix est déjà passé de 35 à 30 roupies. Et ils disent que tout est plein !

Destination la Poste, pour essayer de joindre D. demain matin.
Ayant rejoint Connaught Place, j'emprunte Hanuman Road, bordé d'hôtels particuliers dont le luxe est d'autant plus frappant qu'il contraste avec la misère toute proche. Ici, dès les premiers mètres, c'est résolument résidentiel et à l'écart de l'animation plébéienne.


Un accueil sikh
(note : temple de Gurudwara Bangla Sahib)

La nuit tombe.
Je me dirige vers un bâtiment, guidé par la retransmission de haut-parleurs. L'extérieur fait assez toc, un éclairage au néon sur le fronton donne aux inscriptions un aspect publicitaire. Les différentes ouvertures sont éclairées de couleurs variées, contribuant à créer une lumière de fête foraine.
J'entre quand même, vu l'animation et le mouvement qui règnent sur le parvis, après avoir troqué mes chaussures contre un jeton de laiton numéroté.
Pas besoin d'être très observateur pour se rendre compte qu'on est chez les sikhs. Je déploie donc ma capuche de nylon en guise de turban et m'en coiffe la calebasse.
Arrivée dans la salle, après avoir gravi quelques marches. Face à moi, un baldaquin doré sous lequel s'entassent les offrandes de fleurs qu'un homme est chargé de regrouper. Deux officiants sur les côtés créent l'animation devant les livres et les micros, qui en sermonnant, qui en psalmodiant.
Le devant de la scène est barré par un coffre métallique percé d'une fente très large guidant en son sein toutes les offrandes monétaires. Autour, des sikhs enrubannés, des femmes et des sikhs non enrubannés.
En sortant, distribution à pleine main d'une pâte d'amande sucrée et parfumée, complétée un peu plus loin par un caramel bengali pas mauvais non plus. C'est offert systématiquement, comme si c'était leur devoir naturel, et ça fait un drôle d'effet sympa de se voir donner à manger, comme ça, sans le moindre souci de contrepartie.
Dehors, autour d'un bassin, quatre ou cinq sikhs versent de l'eau sur les mains salies par la pâte sucrée.
Le tour est bien organisé, on se retrouve à nouveau sur le terre-plein, avec une belle et calme pièce d'eau sur la gauche. Il doit y faire bon dans la journée, peut être s'y baignent-ils ?

Guidé par un écriteau promettant un musée concernant un des Singhs, j'emprunte des escaliers puis parviens dans une salle dont la voute aux alvéoles carrées est soutenue par de grands piliers. Il y fait sombre. Le sol est découpé de bandes de tapis parallèles sur lesquelles siègent des fidèles en tailleur.
Je m'approche, pour regarder manger les gens qui se font servir.
Un sikh vient m'interrompre en me demandant si je veux manger, d'une façon si dégagée (d'intérêt, de colère ou d'ennui...) que je suis touché une nouvelle fois. Je dis oui, trop content d'accepter. On fait la queue à part, en attendant la fin du service précédent. Notre tour venu, nous nous installons.
Plateau en alu léger, deux chapatis, dal à la louche et bénédicité ou prière avant de commencer. Il y a même du rab !


Luxe et beaux endroits

Retour vers Connaught Place par Janpath. Visite de l'Imperial Hotel.
Attrait du luxe et des beaux endroits, attirance et retrouvailles, mais pas de nostalgie. Tout cela est si accessible en définitive. Plaisir des yeux, excitation aussi d'être comme je suis, parmi cette société friquée, sale, mal rasé, peu habillé, mais cependant européen. Peut-être une gêne, mais jamais un paria.
Dans les boutiques, bijoux, peintures, fringues, de toute beauté et pas démesurément chères. Cela donne à réfléchir sur mes diverses tentations de business.
_____________________La carte de la journée_____________________

4 commentaires:

  1. Les cartes ne s'affichent pas...
    Marie

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  2. Avec quelle configuration ? C'est OK pour moi sur Mac sous Safari, Firefox, Chrome...parfois un peu long.

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  3. Firefox, Mac OSX 10.5.8. Elles s'affichaient au début. Maintenant, elles ont disparu. M.

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    1. Bonjour Marie,
      Sur un Mac 10.5.8, avec Firefox 16.0.1, la carte 050 s'affiche correctement…
      Google a fait évoluer Maps il y a peu, c'est peut-être un effet de bord.
      https://support.google.com/maps/answer/3031966

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